Le Château

Bulle

Château de Bulle

Assainissement et transformation

Concours 2022 – Projet Lauréat

« Rendre un donjon perméable » Cette antinomie résume le changement de paradigme induit par le projet d’assainissement et de transformation du château de Bulle. En effet, la volonté de le rendre plus accueillant pour le public après le départ du tribunal, de la police et de la prison est un jalon important dans l’évolution du bâtiment.

De par sa position, le château de Bulle est intimement lié au bourg historique. Sa symbolique de lieu du pouvoir cantonal et de fonction sécuritaire lui confère une position imposante, renforcée par sa silhouette qui surplombe la vieille ville le rendant visible loin alentours.

Situation

S'ouvrir sur la ville

Le projet de transformation marque une ouverture vers la population et les visiteurs de passage. Le fait d’y accueillir des espaces culturels, en plus des différents services publics, modifie la perception de cet édifice. Cette évolution se matérialise, entre autres, par l’ouverture des deux accès depuis les douves des flancs est et sud du château, en complément de l’accès principal situé dans le prolongement de la place du Marché, au nord. La mise en valeur de ces deux passages offre une nouvelle possibilité de parcours piéton à travers le bâtiment pour relier différents quartiers de la cité.

La création des espaces de médiation culturelle et d’atelier d’artiste, situés au rez-de-chaussée et directement en lien avec la cour du château, renforce cette vocation publique. Cette position permet une grande souplesse d’utilisation de ces locaux en fonction des activités qui y auront lieu. De plain-pied, ils peuvent être utilisés simultanément à des activités se déroulant dans la cour, à l’air libre. La salle voûtée (anciennes écuries), participe également à cette vocation publique, par exemple en y accueillant des réceptions ou le caveau de festivals. Les sanitaires situés dans la partie excavée de l’angle nord-est sont libres d’accès lors d’évènements publics organisés dans les espaces culturels et dans la cour, en soirée ou pendant les week-end.

Rez-de-chaussée
Premier étage
Deuxième étage
Combles

Parcours à travers les étages

La nouvelle entrée principale commune aux différents services publics se situe au rez-de-chaussée, dans l’angle nord-est. Elle accueille les visiteurs et mène à la nouvelle liaison verticale qui monte jusqu’aux combles, pour atteindre les services situés dans les étages supérieurs. Cette verticalité résout le problème de la position très excentrée du « grand escalier » existant et de l’escalier secondaire en bois de la galerie sud. Par sa position, cette nouvelle liaison verticale répond à la fois aux exigences de voies de fuite et aux exigences d’accessibilité pour les personnes à mobilité réduite.

Les différents services sont distribués de part et d’autre de l’escalier et de l’ascenseur, offrant ainsi une clarté de parcours aux visiteurs qui se rendent dans les différents services. Cette verticalité principale est accessible au public, le « grand escalier » existant servant à l’usage interne des services. Ce dispositif hiérarchise l’attribution public / semi-public de ces deux liaisons verticales.

Au 1er étage, la galerie en surplomb de la cour est entièrement libérée de ses cloisonnements existants. Elle retrouve sa vocation de circulation reliant les trois corps du bâtiment, avec la vue sur cour comme point de repère. La galerie permet aux visiteurs d’accéder aux différents guichets, salles de consultations, de conciliation, d’entretien ou encore de réunion de la préfecture et de l’état civil. La salle de l’ancien tribunal devient la salle de mariage, à proximité directe de la nouvelle liaison verticale. Un petit lift relie les bureaux de l’état civil au local des archives, situé au-dessus de l’espace voûté.

A l’extérieur

La volumétrie du bâtiment n’est pas touché et les ouvertures existantes restent inchangées Seules quelques lucarnes seront ajoutées sur les pans de toiture orientés du côté de la cour. 

L’accès entre la cour du château et les douves côté est sera légèrement adapté pour le rendre plus aisé. Du côté sud, une passerelle-escalier évoquant un pont-levis reliera la courette au pied de la grande tour et les douves, permettant ainsi que prolonger le parcours touristique de la tour et des anciennes prisons.

Les aménagements extérieurs autour du château soulignent l’aspect « artificiel » des douves, s’agissant d’un terrain remodelé pour des raisons défensives. Des cheminements rectilignes longent le périmètre extérieur des douves, donnant ainsi un recul visuel par rapport aux façades. Ces cheminements relient les espaces publics entre la place du marché, le jardin du préfet et le musée gruérien, tout en permettant le passage à travers le château par les deux accès remis en valeur. La géométrie rectiligne des tracés fait écho à la géométrie du château et de ses douves.

Les surfaces vertes entre les cheminements et les façades permettent d’organiser des manifestations à l’air libre, par exemple un marché aux livres, les visiteurs circulant sur les chemins périphériques aux douves. L’espace à disposition permet d’y installer des tentes ou des petites cantines lors d’évènements publics. 

Les arbres majeurs existants sont conservés. Pour maintenir l’espace «défensif» vide que représentent les douves, aucune autre arborisation n’y est prévue. Les cheminements rectilignes du pourtour des douves sont recouverts de gravier et les surfaces vertes couvertes de gazon-prairie.

Principes d’intervention dans la substance patrimoniale

Structure

S’agissant de patrimoine bâti, l’exigence de conservation s’applique prioritairement à la structure de la construction.

La nouvelle destination de l’édifice et son ouverture au public impose l’introduction d’une nouvelle distribution verticale qui permet une articulation claire des différentes fonctions. Cette intervention qui porte atteinte à la structure de la construction est assumée au sens où elle concentre les transformations les plus «lourdes» en évitant une dispersion. La construction de la nouvelle circulation verticale est accompagnée par l’aménagement en sous-sol des locaux sanitaires accessibles au public. A quantité égale, des interventions concentrées portent moins atteinte au caractère de l’objet que des interventions dispersées. 

Par ailleurs les mesures relatives à la structure privilégient l’ajout et évitent le remplacement (mise en place d’un nouveau plancher renforcé pour le stockage des archives).

La priorité accordée à la conservation, en privilégiant le message de la substance matérielle authentique, permet de préserver la lecture de l’histoire de la construction.

 

Aménagements intérieurs

L’objet d’architecture assure sa pérennité par des adaptations successives à des exigences liées à la destination de la construction. Il s’agit d’évaluer la part des éléments variables liés aux exigences de la destination et celle des éléments constants constitutifs de l’identité architecturale de l’objet.

Hormis les aménagements auxquels a été reconnu une valeur patrimoniale, les cloisons qui ont fragmenté les espaces au gré des besoins de l’administration sont supprimées. Les nouvelles destinations imposent un nouveau cloisonnement. Celui-ci est mis en forme dans le but de faciliter la lecture de la configuration spatiale ancienne. Au rez-de-chaussée, les anciens volumes sont réhabilités. Aux autres niveaux, les anciens volumes demeurent perceptibles malgré le nouveau cloisonnement. 

Les nouvelles cloisons seront réalisées en construction légère pour exprimer la variabilité des aménagements par rapport à la pérennité de la spatialité constitutive de l’identité architecturale de l’édifice. Elles sont conçues comme des éléments adaptables au gré de l’évolution des destinations.

Une spatialité retrouvée

La réhabilitation de l’ancienne configuration des espaces s’accompagne d’une forme de mise en adéquation des nouveaux contenus avec les anciens. Les espaces du rez-de-chaussée retrouvent leur rôle d’interface avec la ville. La galerie du premier étage retrouve sa vocation d’espace de distribution. L’intervention d’aujourd’hui s’inscrit comme un nouvel événement dans la biographie de l’édifice. Elle devient une composante de l’histoire de la construction ; elle en propose également une lecture.